Droit de retrait/Droit d’alerte : modèles et mode d’emploi
18/03/2020Droit de retrait - mode opératoire- Concerne tous les personnels
Le risque lié à une pandémie provoquée par un coronavirus ne peut pas être juridiquement qualifié de risque professionnel dans la mesure où la contamination potentielle n’est pas directement liée à l’activité de l’entreprise, et ce même si cela pourrait dégrader les conditions de travail et générer de nouveaux risques professionnels.
Cependant, comme le précise la Cour de cassation dans un jugement du 28 février 2002, l’employeur a une obligation de résultat vis-à-vis de la santé et de la sécurité des salariés (article L. 4121-1 du Code du travail). La responsabilité juridique de cette obligation de résultat est assumée personnellement par le chef d’entreprise. Elle repose sur l’évaluation des risques d’altération de la santé des travailleurs et sur la mise en œuvre des dispositifs nécessaires à leur protection.
L’employeur doit contrôler l’application effective des mesures de prévention, notamment la fourniture des équipements de protection individuelle adaptés.
L’employeur doit intégrer le risque de pandémie dans le document unique de prévention des risques.
L‘article R. 4121-1 du Code du travail ajoute l’obligation de transcrire et de mettre à jour les résultats de l’évaluation des risques professionnels dans le document unique (DUERP). de fait, en cas de risque avérée, le document unique doit être actualisé, afin d’adapter les mesures de prévention pour tenir compte du changement de circonstance et renforcer le niveau de sécurité des travailleurs.
L’article L4131-1 du Code du travail traite du droit de retrait qui permet au salarié de cesser son travail en présence d’un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.
L’article précise que le danger incriminé ne doit pas être un simple risque lié aux conditions de travail, mais être susceptible de porter rapidement atteinte à la vie ou à la santé du salarié.
L’exercice du droit de retrait
* N.B 1 : le droit de retrait est un droit individuel qui peut-être menés et utilisé collectivement.
* N.B 2 : le droit de retrait peu s’exercer si un agent qui travaille dans l’établissement est porteur du COVID-19. Le personnel pourra reprendre le travail, après avoir fait le test de dépistage et ayant eu le résultat de celui-ci.
* N.B 3 : conditions réunies pour l’exercer :
la notion de danger : situation qui donne des motifs raisonnables de penser qu’elle présente des risques pour sa vie ou sa santé.
La notion d’imminence : le danger peut survenir immédiatement ou dans un délai rapproché.
* N.B 4 : aucune sanction, ni aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de cha- cun d’eux. Le salarié peut toutefois être sanctionné si les conditions du droit de retrait ne sont pas réunies ou si son comportement peut s’analyser en une insubordination ou un acte d’indiscipline.
* N.B 5 : le ou la salariée alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Le salarié signale immédiatement à l’employeur ou à son représentant toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. (C. trav., art. L. 231-8)
* N.B 6 : le contexte du Corona n’est plus le même depuis samedi 14 mars :
Le constat a été dressé que sur les 300 personnes en réanimation ce jour-là, la moitié avait moins de 60 ans. Il ne s’agit pourtant pas des personnes dites à risques (plus de 70 ans et/ou fragile, car victime d’affections préexistantes).
Il y a donc matière à être très préoccupé d’avoir une vie sociale normale alors que le pays va vers le confinement. En clair, qu’est ce qu’on fout au boulot alors le virus circule sans personne ne soit testée !
Des mesures d’hygiène incontournables et nécessaires dans les bureaux pour le maintien de l’activité doivent impérativement être garanties par La Poste.
De fait, le droit de retrait peut parfaitement se justifier :
* Si le salarié-e n’a pas à sa disposition de gel hydro-alcoolique, de savon et d’essuie-mains jetables, de masque et de gants. Nous insistons aussi sur les lingettes désinfectantes pour le matériel. Un facteur comme un opérateur de chez Chronopost ou DPD voire du personnel dans une agence Orange sont autant de vecteurs directs de risques s’ils distribuent ou manipulent des objets, même sans signature et des vecteurs indirects s’ils les avisent (les bureaux de Poste bondés, les relais colis, etc..).
* Si le ménage de toutes les surfaces communes (poignées de portes, rampes d’escalier, boutons d’ascenseurs) n’a pas été réalisé.
* Si les consignes gouvernementales ne peuvent être appliquées (distance de 1 mètre entre agents par exemple).
* Si les collègues fréquentent quotidiennement des personnes à risques.
* Si le personnel est en contact direct avec le public, notamment pour les remises en mains-propres ou les services à la personne.
Nous demandons depuis une semaine la mise à jour du Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnel, ainsi qu’un plan de prévention, la Direction temporise et renvoie aux métiers.
Côté pratique
1- Il faut consigner le droit de retrait sur le registre CHSCT, SSCT. (À défaut sur papier libre remis en mains propres (et désinfectées !) Contre une décharge/signature). Qu’il y ait un agent qui se retire de l’établissement ou 40, chaque nom doit être consigné de la même manière.
2- Informer immédiatement la hiérarchie et les représentants du personnel au CHSCT ou CSE (et le syndicat), puis s’éloigner de la source du danger. Il appartient aux représentants du CHSCT de formuler un droit d’alerte ou un DGI (Danger Grave et Imminent) pour appuyer le droit de retrait.
3- Rester à la disposition de mon employeur, c’est-à-dire que dès la prise effective des mesures correctives menant à faire cesser le danger soit le restreindre très scientifiquement, l’agent est susceptible de reprendre tout ou partie de son activité.
Le droit d’alerte du CHSCT et CSE SSCT
En effet, le droit d’alerte du CHSCT ( et du CSE SSCT) est un droit plutôt collectif, il peut inclure tous les salarié-es d’un service, d’un établissement, d’un métier etc...
Le droit d’alerte (même le devoir d’alerte) est un droit individuel de chaque salarié mais il peut, sans détourner le droit du travail, être utilisé et mis en œuvre collectivement.
L’alerte CSE ou CHSCT permet de légitimer un peu plus les retraits de salarié-es ( retraits individuels qui deviennent collectifs s’ils sont mis en œuvre à plusieurs).
Ce qui a de l’intérêt dans la période c’est qu’on peut, à grande échelle, quasiment dans toutes les entreprises engager des alertes CHSCT et SSCT pour danger grave et imminent. La gravité ne fait pas question. L’imminence va fluctuer dans le temps mais c’est de toute manière un très bon moyen de pression collectif et parfaitement légal.
Ci-dessous deux modèles : droit de retrait & droit d’alerte