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La Cour des Comptes savonne la planche du service public
20/02/2025La Cour des Comptes n’aime pas La Poste. Aussi loin que les souvenirs de la fédération SUD PTT remontent (plus de trente ans), la juridiction administrative a constamment tapé sur les missions de service public postal en larmoyant sur ses coûts. Alors qu’une loi postale se profile en 2025 pour la concession du service public postal sur les années à venir, le référé de la Cour des Comptes sur la trajectoire financière de La Poste tombe à point nommé pour les tenants de l’abandon progressif des missions du service public.
Sous prétexte d’apporter des solutions à l’avenir des missions de service public postal, la Cour des Comptes vient en fait conforter la stratégie de désengagement continue que la direction du groupe public mène depuis une vingtaine d’années. Un travail fait avec la complicité des gouvernements successifs, quel que soit leur bord, de la direction de la Caisse des Dépôts et de sa commission par-lementaire de surveillance, sans oublier les élu·es de l’association des maires de France et des col-lectivités territoriales.
Les impasses de la Cour des Comptes
En fait la Cour des Comptes ne s’est jamais tour-née vers les besoins de la collectivité pour rendre ses avis. Elle garde une vision particulièrement étroite et focalisée sur les profits et « l’équilibre » du groupe La Poste. Nous reprochons à l’institution cette attitude qui conforte les pouvoirs publics dans la voie de la dégradation des missions. Cela pose la question du rôle effectif de cette juridiction dans la satisfaction des besoins sociaux. Les non-dits de ce référé sont pourtant édifiants :
Le Réseau postal est passé de 12 660 bureaux en gestion directe en 2003 à 6 290 en 2025 (accompagné de son lot de suppressions d’emplois) avec 10 710 agences et relais mis à la charge des collectivités. Il ne faut pas s’étonner que l’une des raisons expliquant le vote extrême droite de l’année dernière soit l’abandon des territoires et des quartiers populaires par la présence postale (avec l’éducation et la santé). Le président interpellé sur le sujet par notre fédération a assumé la situation en expliquant qu’une présence postale pleine et entière lui « coûterait 400 millions ».
Coté services financiers, la pression sur l’emploi des centres financiers est extrême avec des clientèles défavorisées condamnées à échanger avec des répondeurs pour exprimer leurs problèmes. Mais c’est encore trop pour la Cour des Comptes qui reproche des effectifs trop nombreux, mais se garde bien de critiquer le secteur bancaire qui rejette impunément les clients en difficulté.
Au Colis, la sous-traitance illégale a valu une condamnation à La Poste sur son devoir de vigilance. Quant à l’écologie, le choix du tout routier et tout avion dans le groupe ont fait exploser le bilan carbone du groupe public de 233% en dix ans.
Pour le courrier la distribution à J+4 et J+7, l’arrachage de 30 000 boites jaunes de rue ou encore passer les batteries boites aux lettres en bout de cité ou de village rural à 8%. Les tarifs pourront connaître une hausse de 30%. Ce sera plus lent, plus cher, plus difficile à poster et plus difficile à relever, tous les ingrédients pour accélérer la fin du courrier physique et surtout le passage quotidien des agents de La Poste.
Quant au social, le sort des 230 000 postier·es du Groupe est systématiquement ignoré par la Cour des Comptes sauf quand il s’agit sabrer dans les effectifs. Elle ne relève surtout pas l’austérité exceptionnelle dans laquelle sont entretenus les 160 000 postier·es de la maison mère avec un dé-calage de 8 % entre les salaires et l’inflation depuis 2019, une perte moyenne cumulée de 200€ par mois alors que se poursuivent les négociations 2025.
Sur les milliards investis dans la « diversification », la Cour évoque pudiquement « ..une année 2023 ayant révélé les fragilités du modèle du groupe.. ». En clair elle élude les fiascos de la stratégie de croissance externe avec des pertes en Russie, en Italie ou en France avec l’échec de la French Bank et Stuart, près de 700 millions d’€ de pertes cumulées. Pas de commentaires là-dessus.
Une loi postale de tous les dangers
Le débat sur l’avenir de La Poste est beaucoup trop important pour être laissé aux mains d’énarques et technocrates qui ont validé des années durant plus de 20 milliards d’€ de croissance externe sans 1 € de retour positif sur investissement à ce jour.
Un appel de plusieurs organisations du mouve-ment social à une mobilisation nationale pour les missions de service public de La Poste va être dif-fusé prochainement.