Newsletter du conseil d’administration de juillet 2022
L’été est le traditionnel instant que choisit la direction pour faire des bilans : bilans sociaux, égalité homme femme et Rapport social et environnemental. Comme à son habitude La Poste s’octroie un satisfecit sur son propre bilan (étonnant non ?). Seuls les administrateurs/trices SUD et CGT ont émis des réserves sur ce bilan bien loin des préoccupations des postier·e·s.
Des emplois en chute libre.
À bien regarder les différents bilans, un constat s’impose : les emplois chutent sur le groupe (quasiment 5000 personnes physiques) alors que la Poste poursuit sa politique d’acquisition au niveau international. Si on met un focus sur la maison mère ce sont près de 20 000 emplois en PPH1personnes physiques qui ont été détruits (-11 %) dépassant les 40 000 en 3 ans. Les saignées sont significatives dans tous les métiers y compris ceux connaissant un accroissement d’activités comme le colis.
Seul le colis express voit ses emplois augmenter significativement. Et pour cause, c’est dans ce domaine que La Poste effectue des acquisitions en nombre.
En ce qui concerne l’emploi précaire : le nombre de CDD a baissé de 42 % et représente désormais 4 % de l’effectif en 2021 alors qu’il pesait 6,4 % de l’effectif en 2020. Parallèlement, le nombre de personnels en intérim a augmenté de 40 % en une année et de 126% en deux ans. Pire, le nombre d’intérimaire croît de 245 % au courrier… Alors que la direction nous annonce une baisse du trafic courrier, elle emploie de plus en plus d’intérimaires. La direction du courrier appuie sa politique de recrutement principalement sur l’intérim. Pas étonnant quand le directeur de la BSCC a été directeur dans le secteur automobile qui utilise ces méthodes depuis des années.
Côté CDI, c’est une baisse nette de 1000 PPH. La Poste fait disparaître plus d’emploi qu’elle n’en crée. Conséquence : une augmentation de la part de l’emploi précaire dans les effectifs de la maison mère de 1,5 point en deux ans.
Le nombre de démissions a augmenté de 20 % dans l’entreprise. Le nombre de licenciements augmente lui de 32 % et le nombre de licenciements pour inaptitude de près de 40 %. Cela met en lumière deux faits principaux : l’entreprise devient de moins en moins attractive pour le personnel et les métiers de La Poste sont de plus en plus pénibles. Quand des intérimaires, voire des alternant·es, ne veulent pas être embauchés, c’est qu’il y a un vrai problème. Face à une crise de recrutement, la question des niveaux de salaire dans l’entreprise, mais aussi des conditions de travail doit être posée.
Égalité professionnelle : le verre à moitié vide.
Sur le groupe
Nous n’avons que peu d’indicateurs sur la question d’égalité professionnelle sur l’ensemble du groupe. Il faut aller fouiller dans le bilan RSE pour trouver quelques chiffres épars et ils ne sont pas glorieux.
Le nombre de femmes embauché sur le groupe France a baissé de 1 point et est en dessous des 50 % des recrutements. Du côté des effectifs, les femmes dans le groupe en Europe représentent moins de 50 % de l’effectif. La rémunération annuelle des femmes par rapport à celle des hommes sur le groupe en Europe est plus basse de 1500 euros soit une différence de 5 %. Sur le groupe France, la différence est de 4,5 %. Il est donc facile pour l’entreprise de se réfugier sur des résultats qu’elles annoncent satisfaisants sur la maison mère.
Sur la maison mère
La plupart des membres du Conseil d’Administration de La Poste a préféré voir le verre à moitié plein tout en essayant de se persuader que ce n’était pas si mal, car moins bien ailleurs. Ce n’est pas une raison pour mettre certains problèmes sous le boisseau. À y regarder de plus près le fameux indice de 94/100 décerné à La Poste est un gros séquoia qui cache une forêt pas bien en point. L’écart de salaires chez les cadres supérieurs existe toujours et il diminue moins rapidement dans les groupes B et C que chez les groupes A. Parmi les plus hautes rémunérations, il n’y a que 30 % de femmes alors que l’entreprise est féminisée à plus de 50 % : cela n’a toujours pas évolué depuis trois ans, alors que de nouveaux recrutements et nominations ont eu lieu : Le nouveau patron de GEOPOST nommé est un homme, un homme a été recruté à la tête de La Banque Postale, etc.. Les femmes Ingénieurs et Cadres (du 3.3 au groupe B et C) gagnent en moyenne 3250 euros de moins que leurs collègues hommes. Le nombre de femmes à temps partiel promues a drastiquement chuté. Et sur ce dernier point, le COMEX et la DRH n’ont pas apporté de réponse.
Enfin, la question de la part variable demeure un vrai point d’amélioration pour les grades 2.3 et dans le groupe A où cet élément de rémunération reste en dessous de celles des hommes. Autre indicateur à creuser : la part variable a tendance à baisser globalement chez les femmes alors que pour les hommes elle augmente…
Et l’écologie là-dedans ?
Sur les questions écologiques, Le Groupe La Poste a tendance à sortir les bons points. On ne peut ignorer certains efforts de la part du groupe, mais cela ne peut occulter les points noirs révélés par le RSE, conséquences directes de la stratégie du groupe :
Les émissions de gaz à effet de serre du groupe La Poste s’élèvent à près 2,7 millions de teqCO2, en augmentation de 12,6 % en 2021. Quand le groupe augmente son chiffre d’affaires, ses émissions de gaz à effet de serre augmentent encore plus vite. Les acquisitions à l’international dans des entreprises du colis quelquefois peu regardantes sur la question environnementale et l’importance de la sous-traitance entraînent une explosion des gaz à effet de serre (+63 % pour le transport aérien - la sous-traitance correspond à 91 % de l’augmentation et la livraison de colis à 15 % de l’augmentation).
Même si l’émission de gaz à effet de serre par colis a baissé, les conséquences d’une croissance exponentielle dans le domaine posent des questions sur le modèle environnemental qu’induit un développement effréné. Alors qu’en 2014 LA Poste s’était fixée un objectif constant de baisse de gaz à effet de serre en signant la charte « Objectif CO2 » de l’Ademe , force est de constater que chaque année les émissions augmentent. Le secteur du e-commerce est en soit un fléau pour l’environnement et le dérèglement climatique dans une concurrence qui poussent les entreprises à offrir des services assez destructeur (retour gratuit des colis par exemple)
Du côté de la banque
La Banque Postale a sorti 5 milliards d’euros pour pouvoir prendre le contrôle de la CNP. Si on peut se féliciter de la sortie de la bourse annoncée par la direction, ne nous trompons pas la Banque Postale suit ce qui se passe dans les autres banques. On peut aussi se poser les questions des conséquences globales sur les postier·e·s du groupe notamment dans la banque, dans un secteur où les salaires stagnent depuis des années. Globalement on ne peut pas dire que la politique de rémunération soit à hauteur des enjeux actuels. Avec une inflation de près de 7 % à l’automne, l’urgence de revoir les salaires à la hausse est là sur l’ensemble du groupe France. Surtout que le salaire du PDG de La Poste est 17 fois plus élevé que le salaire médian d’un·e postier·e.
Enfin, nous apprenons au détour d’une émission de BFM business que La Banque Postale a mis en place un fond pour aider des start-up dans la Fin Tech et investie 115 millions d’euros pour le développement de projet. Mais elle développe aussi des partenariats avec des entreprises de cybersécurité en Israël. Or, la plupart des avancées dans ce domaine, à des fins la plupart du temps militaires, sont testées grandeur nature sur les Palestinien·nes. Ces investissements risquent de se faire pas sur le dos d’une population qui subit depuis des années une colonisation galopante.